Quelques avantages de l'incorporation
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Transfert d’achalandage

Le premier conseil qui vient à l’esprit d’Alain Bertrand, comptable, fiscaliste et associé au cabinet Blanchette Vachon, est le transfert de son achalandage à une société par actions qu’on aurait soin de constituer au préalable. «L’achalandage, s’il n’est pas de nature personnelle, c’est généralement la valeur de sa clientèle», explique-t-il.

«Il y a donc une occasion de se rémunérer un peu d’avance pour les deux ou trois prochaines années, par exemple, en vendant à la juste valeur marchande son achalandage à la société par actions. On s’interroge souvent si l’on doit se verser une rémunération sous la forme de dividendes ou d’un salaire, mais le transfert imposable de l’achalandage constitue une autre façon de retirer des sommes de la société», poursuit le fiscaliste.

Quel est l’intérêt de procéder ainsi, puisque le gain réalisé lors du transfert à la société sera imposé ? «Il n’y a pas de coût fiscal lié à l’achalandage dans bien des cas, car celui-ci a souvent été constitué par le professionnel au cours des ans. Le coût fiscal est donc de zéro, d’où la réalisation d’un revenu imposable à la moitié s’apparentant au traitement fiscal du gain en capital», concède celui qui est associé au cabinet situé sur la Rive-Sud de Québec.

Alain Bertrand précise toutefois son point de vue. «À titre d’exemple, disons que je transfère mon achalandage évalué à 200 000 $ à sa juste valeur marchande, sans faire aucun roulement. Oui, je serais alors imposé sur 200 000 $, mais la société me doit 200 000 $ et elle pourra me verser moins de dividende ou de salaire au cours des deux ou trois années suivantes», acquiesce-t-il.

Il ajoute : «Étant donné que seulement la moitié du revenu est imposé, au lieu de payer approximativement 50 %, je ne paierais que la moitié, soit 25 %.»

Le fiscaliste poursuit. «Récemment, on disait qu’un dividende, selon qu’il était déterminé ou pas, était imposé entre 35 et 40 % au taux marginal le plus élevé. Un taux de 25 %, c’est quand même mieux !» se réjouit-il. De plus, la société pourra déduire une partie de l’amortissement de cet achalandage.

Interrogé par Finance et Investissement quant à savoir si un représentant en assurance pourrait procéder ainsi avec son book, Alain Bertrand y va de son observation. «Je crois que oui. Pour un représentant en assurance, la valeur du book, c’est de la clientèle», répond-il avec prudence.

Il met toutefois en garde : «Il ne faudrait pas qu’il l’ait acheté toutefois. Dans ce cas, seule la plus-value serait admissible».

Par exemple, si un représentant achetait une clientèle, disons pour 100 000 $, il ne pourrait pour la première année qu’effectuer un amortissement de 7 % des trois quarts du coût d’acquisition, soit 7 % de 75 000 $.

Fractionnement de revenu

Un autre avantage de l’incorporation repose sur la possibilité de fractionner le revenu avec des proches, notamment le conjoint et les enfants majeurs. «On pourrait attribuer des actions participantes à l’entrepreneur et des actions ne donnant droit qu’aux dividendes au conjoint ou aux enfants majeurs pour leur distribuer des revenus», explique Alain Bertrand.

Par exemple, on pourrait verser un dividende ordinaire de 30 000 $ à un enfant majeur qui fréquente le cégep ou l’université. Si c’est son seul revenu, il paierait moins de 1 000 $ en impôt, 150 $ au Fonds des services de santé et 100 $ de contribution santé. Soit beaucoup moins que ce qu’aurait payé son père ou sa mère entrepreneur.

Une planification qu’appuie Francys Brown, associé du cabinet comptable Demers Beaulne. «Je n’ai pas vérifié l’exactitude des montants d’impôt et des cotisations payables fournis dans cet exemple, mais l’ordre de grandeur me semble bon. D’un point de vue conceptuel, c’est bon», précise toutefois le fiscaliste.

Déduction des intérêts sur prêt hypothécaire

Alain Bertrand suggère également que la société par actions rembourse temporairement à l’entrepreneur le montant du capital qu’il aura contribué afin de lui permettre, disons à titre d’exemple, de rembourser le prêt hypothécaire sur sa résidence ou sur son chalet.

L’entrepreneur utilisera les sommes que lui aura remises sa société par actions pour rembourser l’institution financière. Dans un deuxième temps, il hypothèquera de nouveau son immeuble pour réinvestir dans la société. Ce stratagème permettra à l’entrepreneur de déduire des intérêts qui ne l’étaient pas auparavant, car le prêt est dorénavant explicitement réalisé pour investir dans l’entreprise.

Le comptable donne un conseil. «Cette planification est acceptée par le fisc. Il faut s’en tenir autant que possible aux méthodes que les autorités fiscales ont reconnues dans le passé. Si l’on change la manière de procéder, on peut se demander si cela sera acceptable», avertit-il.