Beaucoup lui déconseillaient ce changement risqué d’orientation après près de 30 ans de carrière. Certes, l’assurance n’est pas si loin de l’actuariat, mais c’était quand même un domaine totalement nouveau.

Robert Dumas a pris deux ans pour mener cette transition. Il cherchait «une industrie en croissance, qui présentait un défi intéressant». Il est devenu vice-président principal, produits à la Financière Sun Life en septembre 2012, puis a été nommé président pour le Québec en octobre 2014. La preuve qu’il ne s’était pas trompé…

«La Financière Sun Life connaissait une érosion de ses parts de marché au Québec au profit d’acteurs locaux, car elle manquait de proximité avec les gens dans la province, rappelle le président. Le défi, c’était de recréer ce lien.»

Premier ingrédient nécessaire : la franchise des mentors

Ce que Robert Dumas a toujours attendu des personnes qu’il sollicitait, c’est la franchise. «Il faut qu’ils n’aient pas peur de me dire comment ils prennent le problème, qu’ils osent me défier et me dire quand ils voient les choses différemment de moi», confie-t-il.

Pas facile de trouver des personnes capables d’une telle transparence alors que Robert Dumas occupe aujourd’hui un poste très en vue. La complaisance est souvent de mise. «Dans un poste de direction, c’est difficile de trouver des gens qui me contredisent. Pourtant, à ce poste comme ailleurs, j’ai besoin de faire des reality checks», lance le président.

Qu’à cela ne tienne, Robert Dumas sait d’abord pouvoir compter sur quelques connaissances devenues des amis de longue date, qui jouent ce rôle de bonne grâce et sans ménagement. Mais il sait aussi s’inspirer des personnes qu’il croise. «J’analyse beaucoup les autres et je m’améliore à leur contact. Je m’inspire de ce que j’aime en eux et de ce qu’ils savent mieux faire que moi. J’apprends aussi de leurs erreurs», raconte Robert Dumas, qui a le souci de «l’amélioration continue».

Il s’est entouré de mentors informels pendant toute sa carrière. «Pour chaque période, j’ai choisi des personnes inspirantes vers qui je me tournais de temps à autre : d’abord parce que je recherchais l’excellence technique dans ma profession, ensuite pour améliorer mes qualités de leadership, pour mieux communiquer devant un groupe, etc.», souligne-t-il. C’étaient généralement des professionnels dans la même industrie que lui, plus expérimentés. «Je cherchais la personne qui avait l’autorité dans son domaine, les gestionnaires qui s’illustraient dans leur action», indique Robert Dumas.

Autres ingrédients : l’affinité et l’humilité

Pour prendre le maximum de ce que les autres peuvent donner, il faut adopter une attitude d’apprenant et rester ouvert. «Ça demande de l’humilité et du réalisme», reconnaît le dirigeant. Autre ingrédient incontournable : l’affinité. «Il faut de la complicité pour que cet échange fonctionne», poursuit-il. De la confiance aussi.

Mais cette démarche demande également une certaine indépendance d’esprit. «J’ai toujours voulu sauvegarder mon indépendance par rapport à mes mentors. Le besoin d’échanger continuellement peut être compliqué. Il faut aussi savoir faire confiance à son instinct», affirme-t-il.

Autre source d’inspiration : la littérature militaire. «Je lis beaucoup sur les guerres et les dirigeants militaires», confie Robert Dumas. Ce n’est pas l’aspect belliqueux qui l’intéresse, mais la stratégie, la vision de ces hommes, qui ont forcément beaucoup de leadership. «Certains aspects de ma personnalité de gestionnaire viennent de là. Ce sont généralement des gens qui ont une vision et savent la communiquer, qui réussissent à convaincre et mobiliser leurs troupes pour des actions pourtant souvent difficiles, à les faire se dépasser. L’innovation est aussi au coeur de la chose militaire», énumère-t-il.

Convaincu de l’importance des mentors, même informels, pour mener une carrière, Robert Dumas joue à son tour ce rôle pour des plus jeunes, notamment à L’effet A.